mercredi 15 septembre 2021

Voyages Immobiles - Le Grand Tour - Diptyque

 Pour l’anniversaire des soixante ans de la Maison, Diptyque organise une exposition intitulée « Voyages immobiles – Le Grand Tour ».

Le lieu de l’exposition « La Poste du Louvre » est, déjà, une invitation à l’ailleurs.

La brochure, donnée à l’entrée, présente les 9 artistes ainsi que leurs œuvres. Cinq destinations sont mises à l’honneur : Paris, Venise, Milies (Grèce), Byblos (Liban), et le Japon. 5 nouveaux parfums correspondent à ces destinations.

Le parfum Paris, réalisé par Olivia Giacobetti, évoque l’odeur des livres anciens, celle du bois ciré des antiquaires, et du pavé parisien. J’ai, aussi, une impression de clou de girofle. Cette fragrance accompagne la création « Un temps après la jeunesse » de Joël Andrianomearisoa : 34 panneaux associant dessins et poésie (comme le 34 bd St Germain). Des noms de fragrances et matières premières sont égrenés dans cet hymne. C’est la première étape, et le voyage commence déjà. Les préoccupations, le quotidien se dissipent, et laissent la place à un instant de liberté donné par les artistes, leur vision, leur univers.

Avec Gregor Hildebrandt, nous faisons escale à Venise. Sa création "Wo das Wasser rinnt" avec ses disques vinyles fait naître des images de la lagune. J’ai aimé l’installation Summertime, réalisée avec des boîtes de cassettes en plastique. Une silhouette y est imprimée au jet d’encre. Ces boîtes de cassettes évoquent une autre époque, convoquent une certaine nostalgie. Et la silhouette semble un peu floue, comme dans un souvenir.

Dans cette même salle, il y a un second parfum sur le thème de Venise cette fois, créé pour La Laguna de Johan Creten. Le parfum de Cécile Matton est une approche originale pour évoquer la Sérénissime : des notes vertes, de basilic, de poivron vert avec des accents de mandarine et de vétiver. La Laguna est une miniature en bronze d’une sirène immergée dans une cire bleu vert. Elle émerge peu à peu lorsque la bougie se consume. C'est, aussi, une représentation des épisodes inquiétants d’acqua alta.

Au premier étage, accroché au plafond, l’arrangement de Ange Leccia avec ses globes terrestres identiques alignés nous interpelle, suscite des images de mappemondes anciennes, de voyages lointains. Cette disposition peut nous rappeler, aussi, l’urgence à prendre soin de notre planète, dans la course à la vitesse de notre monde.

Nouvelle halte, en Grèce, à Milies, avec l’artiste Zoë Paul, et une de ses créations « The Cave of Chiron ». Chiron, dans la mythologie grecque, était un centaure réputé pour sa sagesse, et son art de guérison. Son nom est dérivé du mot grec kheir qui signifie « main ». L’artiste a réalisé un rideau de perles de céramique en forme de main. Son œuvre abrite aussi un palet de porcelaine parfumé à l’immortelle, au cyprès et au figuier. Le parfumeur est Olivier Pescheux. Je suis impressionnée par l’équilibre entre le côté ambré, chaud de l’immortelle, et la fraîcheur apportée par le cyprès et le figuier

La salle suivante nous invite au Liban dans un Byblos rêvé par l’artiste Chourouk Hriech. J’aime beaucoup le graphisme de ses papiers peints et dessins. Et quelle belle question soulevée avec sa vidéo « A qui appartiennent les cieux ? »

Dans cette même salle, Secretum de l’artiste Rabih Kayrouz, a été une source d’inspiration pour Byblos, le parfum  de café, de cardamome, de cèdre imaginé par le parfumeur Fabrice Pellegrin. J’apprécie l’association singulière du café et de la cardamome.

Une autre halte est prévue, en Grèce, de nuit, cette fois, à Athènes avec l’artiste Andreas Angelidakis. C’est un voyage entre la Grèce antique et moderne avec le thème commun des ruines : ruines archéologiques, et ruines numériques ou « post-ruines ». Cette installation nous incite à nous interroger sur le devenir des milliers de données laissées sur internet. L’artiste a réalisé des modules en coussin de mousse avec un décor de marbre qu’il est possible d’empiler, ou d’arranger à sa guise pour s’asseoir. Symboliquement, avec ces modules, chacun est enjoint à reconstruire le monde.

Enfin, une dernière salle nous accueille avec un tableau monochrome de teinte jaune orangée, un parfum héspéridé de Alexandra Carlin, le chant d’oiseaux, qui provient d’un film sur Kankitsuzan « La Montagne des Agrumes ». Nous sommes transportés , grâce à nos sens, sur la Riviera japonaise, invités à méditer sur la relation de l'homme avec la nature.

C’est la pièce dédiée au travail de Hiroshi Sugimoto.

Fragrance of Infinity est un flacon en verre optique conçu par l’artiste.

Notre tour n’est pas tout à fait terminé. La boutique éphémère est dans la continuité de l’exposition, car elle propose des créations d’artisanat d’art, comme la porcelaine de Gien, ou encore de splendides bougeoirs en bronze, réalisés selon de savoir faire du moulage à la cire perdue par Ossana Visconti.

L’agencement sur un mur entier réalisé avec des cartes postales est très design aussi.

Le temps d’une exposition, Diptyque nous convie à un voyage sensoriel, dans différentes destinations. Les créations des artistes rajoutent à l'exotisme une respiration, un moment de liberté, de beauté. L'art donne un supplément d'espace.